Le rugby international, le grand écart
- Pablo Guillen
- 21 oct. 2023
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 24 oct. 2023
En 2023, plus que jamais, l’écart entre nations principales et nations émergentes du rugby s’accroît, un problème qui apparaît aujourd’hui comme un frein dangereux au développement de ce sport dans le monde entier.
On le pressentait depuis quelque temps, la Coupe du Monde l’a confirmé. L’écart entre les grandes nations du rugby et les pays émergents ne cesse de croître, rendant le développement de ce sport de plus en plus délicat. Des scores fleuves, et des matchs inintéressants ont animé les poules de cette édition 2023. Plus de 8 rencontres se sont soldées par des écarts de plus de 50 points, une première dans l’histoire de la Coupe du Monde. En jetant un coup d'œil au classement IRB de World Rugby, l’écart de points entre les pays du Tiers 1 et ceux du Tiers 2 et 3 en devient presque ridicule. Aujourd’hui plus que jamais, le sport au ballon ovale se partage entre seulement quelques équipes.

Un danger pour les nations émergentes du rugby, mais aussi pour le sport en lui-même, considéré comme élitiste, qui fatalement, ne parviendra pas à se développer dans le monde si l’écart ne se resserre pas. Matthieu Lartot, journaliste pour France Télé, se positionnait sur le sujet en milieu de Coupe du Monde : “Il serait utile d’aider davantage les nations du Tiers 2 et 3 dans leur développement pour resserrer les écarts de niveau”. Une opinion très partagée par les amateurs de rugby, qui souhaitent voir ces équipes grandir dans le rugby international. Car des nations comme le Portugal, la Géorgie ou l'Uruguay ont montré un bien beau visage durant cette Coupe du Monde en France, rappelant que les Tiers 2 et 3 peuvent aussi tirer leur épingle du jeu. Oui mais voilà, au rugby la sensation n’existe pas, le fort vaincra toujours le faible, et les moyens mis en place aujourd’hui par des fédérations comme l’Irlande, la France ou l’Afrique du Sud ne font qu’augmenter la différence de niveau, là où les nations du Tiers 2 et 3 ont des moyens, des infrastructures beaucoup moins développées. Des équipes jouent même la Coupe du Monde avec des joueurs non professionnels. Le cas de la Namibie : des joueurs de 9ème division du championnat français, affrontant le meilleur joueur du monde Antoine Dupont, un écart abyssal, montrant les failles importantes du rugby, qui plus que jamais semblent difficiles à combler. La crise sanitaire de la Covid 19 apparaît comme une des grandes responsables de cet écart qui s'est creusé. La Coupe du Monde 2019 avait été globalement assez serrée, mais avec la longue pause dûe à la pandémie, seules les équipes du Tiers 1 ont vraiment continué à jouer, à s'entraîner, à s'opposer avec les autres grandes nations, contrairement aux nations émergentes, globalement laissées aux oubliettes. Alors que faire, organiser plus de rencontres entre des nations importantes lors des tournées d’Automne ? Les fédérations anglaise et irlandaise ont déjà annoncé leur envie de solliciter le Portugal pour organiser une rencontre ou des entrainements à haute intensité. Une très bonne initiative de la part de nations influentes du rugby dans l'optique d'un développement de ce sport. Néanmoins trop d'éléments entrent en jeu avant de favoriser le développement des nations émergentes. World Rugby est ici fortement pointée du doigt par les amateurs de rugby, comme l'un des principaux responsables de ces écarts importants.
Pourtant il y a quelques semaines, le président de World Rugby Bill Beaumont déclarait vouloir aider à développer les pays émergents du rugby dans le futur, et annonçait une hausse des pratiquants du rugby dans le monde avec cette Coupe du Monde 2023.

Les instances du rugby mondial toutes réunies à Paris, le moment est idéal pour se questionner sur le développement de ce sport. Le Rugby Europe Championship, appelé "Tournoi B" derrière le Tournoi des 6 nations oppose des nations du Tiers 2 et 3, des équipes qui peinent à progresser, affrontant des nations importantes tous les 4 ans, où l'écart n’a certainement jamais été aussi important qu’aujourd’hui. Sur les réseaux sociaux, les amateurs de rugby se questionnent sur l’intérêt de faire jouer des matchs comme cela, avec toujours la même réponse : il est important pour ces nations de se tester, de jouer face aux meilleurs joueurs du monde. Oui mais à quoi bon ? Pour prendre 80 points à chaque match, l’intérêt est nul. L'envie des organisateurs d’augmenter la Coupe du Monde à 24 équipes, est justement massivement pointée du doigt. Car il y a bien d’autres choses à réaliser avant d’augmenter une Coupe du Monde déjà inintéressante. L’aide doit être apportée entre les Coupe du Monde, c’est la que World rugby
doit faire le travail. La fédération "Rugby Europe" a été créé dans l'optique d'aider les nations émergentes sur le vieux continent. Mais les moyens donnés ne sont pas toujours conséquents.
World Rugby fait aujourd’hui face à un défi énorme, celui de promouvoir le ballon ovale, d'enrichir son développement, car le vent de fraîcheur qu’apporte les nations émergentes est fort, et aurait bien des avantages à bouleverser la hiérarchie historique du rugby.
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