Coupe du monde 2031 : le chantier américain

Les Etats-Unis vont accueillir la 12e édition de la Coupe du monde de rugby dans sept ans. D’ici là, le travail à faire pour démocratiser le sport au ballon ovale sera immense, dans un pays dominé par le football américain et le basket.

Les USA à la Coupe du monde 2019 (USA Rugby)

Le jeudi 12 mai 2022, World Rugby validait la candidature américaine soutenue par le président Joe Biden pour la Coupe du monde de rugby à XV 2031, mais aussi pour son homologue féminine en 2033.

Cette attribution est la suite logique de l’envie d’expansion du rugby par les instances internationales. Après une première édition sur le continent asiatique au Japon en 2019, c’est maintenant à l’Amérique d’accueillir la compétition la plus prestigieuse.

Si le gouvernement américain se félicite de cette victoire, le pays de l’Oncle Sam se lance dans une grande aventure et va devoir effectuer un travail important : absent lors de la dernière édition en France, le pays doit déjà rehausser le niveau de son équipe nationale pointant actuellement à la 17e place du classement des nations IRB mais surtout faire découvrir la culture de ce sport, encore considéré comme mineur, à la population.

Comme souvent, les Etats-Unis voient les choses en grand : Jim Brown, président du groupe de candidature d’USA Rugby table sur un budget de 500 millions de dollars pour organiser les deux Coupes du monde. Un budget selon lui « essentiel pour la croissance du rugby dans le monde ».

"USA Rugby va maintenant s'aventurer dans une nouvelle ère et s'assurer que le tournoi le plus prestigieux de ce sport soit un tremplin pour susciter un enthousiasme et une passion durable pour le rugby d'un océan à l'autre", a commenté le directeur général de la Fédération américaine, Ross Young.

Un intérêt pas assez important

La plupart des amateurs de sport aux Etats-Unis ne devaient même pas être au courant de la tenue de la Coupe du monde en France, pourtant troisième événement sportif le plus important, tant le rugby n’est pas assez démocratisé aux Etats-Unis. Car le football américain, le basketball et le baseball sont les sports les plus influents, loin devant le rugby. Les progrès à accomplir sont donc énormes pour espérer remplir les grands stades de NFL, championnat du football américain, qui seront utilisés en septembre 2031 dans les villes de New York, Chicago ou encore Miami. De même pour World Rugby qui a fait ce pari et qui devra prouver que ce sport s’universalise dans le monde entier.

Si le rugby est globalement pratiqué en Europe et en Océanie, il peine à trouver sa place sur le continent américain. Seulement 130 000 licenciés dans 2500 clubs pour un pays comptant 331 millions d’habitants, encore trop bas pour espérer faire du rugby un sport important. Pourtant importé en 1874, le rugby aux Etats-Unis est un sport qu’on peut considérer encore émergent et qui compte par conséquent beaucoup de retard. Exemple significatif, le championnat national n'a été professionnalisé qu'en 2018 sous le nom de Major League Rugby, là où le Top 14 possède 30 ans d'avance.

Des premières avancées

Le récent partenariat entre les Etats-Unis et le Stade Toulousain, qui s’est déplacé au pays de l’Oncle Sam dans le cadre d’une confrontation face à l’équipe nationale permet de donner de nouveaux horizons au rugby. Le sport aux Etats-Unis est surtout développé par les rencontres universitaires. En ce sens la Varsity Cup Championship, championnat universitaire de rugby aux Etats-Unis connaît un succès bien trop mineur pour espérer voir le nombre de fans évoluer.

Victoire des Etats-Unis face au Stade Toulousain, 24-21 (USA Rugby)

Malgré le travail à faire, de nombreux états-uniens sont enthousiastes à l’idée de voir leur pays accueillir la Coupe du monde : « Les Américains sont faits pour être des fans de rugby, mais ils ne le savent pas encore ! Le rugby rassemble tout ce qu’ils aiment dans les autres sports, le physique du foot américain, la technique individuelle du basket, ou encore la fluidité et la psychologie du soccer. » explique Kimball Kjar, international ayant participé à la Coupe du Monde 2003 en Australie. Le président Joe Biden qui a grandement contribué à la réussite de cette candidature n’a jamais caché son amour pour le rugby et avait salué la victoire de l’Irlande en terre Néo-Zélandaise en 2021.

Durant les prochaines années, le développement de la culture du rugby passera aussi par les Jeux Olympiques et la discipline à 7. Les Etats-Unis se sont qualifiés pour ceux de Paris l’été prochain et le pays devra en faire un point d’orgue en fédérant derrière l’équipe. L’exposition mondiale de cet événement peut clairement faire grandir l’intérêt de ce sport à la population et notamment à des publics jeunes. « On doit réussir à attirer de nouveaux fans, un public plus jeune. Si on se contente de compter seulement sur la communauté actuelle du rugby pour grossir économiquement, on ne réussira jamais » assure Kimball Djar.

USA Rugby qualifié pour les JO 2024 (USA Rugby)

Les dernières éditions de la Coupe du monde ont montré que le rugby gagnait de plus en plus le cœur des populations, avec des engouements inattendus. Celle du pays du soleil levant en est l’exemple frappant, ayant été la Coupe du monde la plus regardée de l’histoire. Démocratisé en Europe et en Océanie, le rugby est pourtant encore un sport qui s’ouvre à trop peu de pays. Il s’attaque désormais au continent américain, sur lequel le potentiel est immense. Les amateurs de rugby espèrent réitérer le succès de la Coupe du monde de football 1994, ou le sport appelé « soccer » avait connu un réel engouement. Les Etats-Unis ont sept années pour préparer l’événement et faire changer de dimension le rugby de l’autre côté de l’Atlantique.